Jean-Gabriel Perboyre, Lettre 041. A son Cousin Gabriel, à Montdidier

Francisco Javier Fernández ChentoÉcrits de Jean-Gabriel PerboyreLeave a Comment

CRÉDITS
Auteur: Jean-Gabriel Perboyre · La source : Lettre 33. — Maison-Mère, original 25..
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Mon très cher cousin1,

La grâce de N. S. soit toujours avec nous.

Enfin voici venir les réponses aux questions que vous m’avez adressées.

1° La permission du supérieur local vous suffit pour que vous soyez bien et dûment autorisé à employer vos honoraires de messes à la bonne œuvre à laquelle vous les consacrez. Ainsi l’a décidé M. le Général. Toutefois vous savez que la permission de disposer des honoraires n’emporte pas celle exigée par l’article 11 de l’explication du vœu de pauvreté, pour pouvoir les retenir chez soi, etc. Celle-ci doit être expresse, et le supérieur local peut l’accorder. Ainsi a décidé M. le Général, qui n’abandonne les honoraires aux confrères, dans sa dernière circulaire, que positis ponendis, c’est-à-dire en supposant toutes les permissions particulières précédemment requises.

2° Tous les confrères prêtres sont obligés à titre de justice de dire une messe pour tous les confrères défunts de la Congrégation. L’Assemblée générale de 1668 statua d’une manière préceptive que tous les prêtres de la Congrégation diraient cette messe. M. Cayla2, dans sa circulaire de 1788, déclare n’accorder la permission de disposer des honoraires qu’à condition qu’on rendra les suffrages ordinaires à nos morts. M. le Général m’a dit que cette disposition de la circulaire de M. Cayla était toujours en vigueur et qu’il n’entendait pas la révoquer. Ainsi un confrère qui serait infidèle sur le point en question, non seulement se rendrait coupable envers les confrères défunts et les supérieurs, mais encore serait injuste envers la Congrégation, à laquelle il volerait tous les honoraires qu’il s’approprierait, parce qu’il n’aurait pas rempli la condition à laquelle ils sont accordés.

3° La susdite obligation s’étend sans restriction au cas de la circulaire de l’an passé. Le nécrologe qu’elle renferme sans exception d’aucun Polonais, était adressé à tous les confrères qui étaient prêtres à cette époque. Ainsi a décidé M. le Général. Si vous n’êtes pas bien en règle sur tout ce qui précède, il ne vous reste donc qu’à vous y mettre, en .acquittant les messes arriérées : le très Honoré Père ne croit pas pouvoir dispenser en cela. Pour que vous soyez un peu moins chargé, je vous tiens quitte des 23 Fr. que j’avais avancés à votre sœur ; je vous prie de ne plus y penser.

4° L’Assemblée de 1688 exhorte aussi les prêtres de la maison où un confrère mourra, à dire deux messes de plus pour lui, si les obligations des fondations le permettent. Elle décrète encore qu’à l’avenir chacun de nos prêtres célébrera, autant que possible, une fois par mois le Saint-Sacrifice de la messe pour nos défunts en général (traduit textuellement de la 4e session). M. le Supérieur, sans bien se prononcer sur la nature de l’obligation dans ces deux derniers cas, ne pense pas que vous deviez revenir sur le passé. Oh ! si nos pauvres confrères défunts pouvaient nous députer un avocat, comme ils nous feraient rappeler cette divine maxime : in quâ mensurâ mensi fueritis, remetietur vobis.

5° Quant à la messe qui se dit tous les mois pour la conservation de l’esprit primitif de la Congrégation, voici ce qui en est. D’après le vœu et l’avis de l’Assemblée générale, M. Alméras3, dans une circulaire de 1668, recommanda, sans toutefois l’imposer, cette messe, ou une communion pour ceux qui ne sont pas prêtres. Ceci n’emporte pas, il est vrai, une obligation rigoureuse ; mais c’est là une pratique si belle, si utile, si respectable par son origine et par l’usage qui l’a consacrée qu’on a bien de la peine à concevoir qu’un bon missionnaire l’omette sans graves raisons. Je vous le demande, cher cousin, n’est-il pas aussi convenable de consacrer une seule messe à obtenir un esprit, auquel se rattachent tous nos intérêts présents et futurs et duquel dépend un bien incalculable pour la Religion, que d’en consacrer 20 ou 30 à opérer un bien individuel en faveur d’un parent ou d’un étranger ? etc., etc., et quand la Congrégation ne nous redemande qu’une si minime partie de ce qu’elle… pouvons-nous4 !…

6° M. Vicart5 peut signer sans scrupule la formule que je vous ai envoyée. Vous l’avez signée vous-même, ainsi que tous ceux qui ont fait les vœux ici. Pour l’uniformité, il faut que ceux qui les font en province la souscrivent, parce que leur déclaration est annexée au grand registre. Ceci au reste ne fait rien à la validité des vœux. Sans avoir lu les Brefs d’Alexandre VII et de Clément X, M. Vicart en connaît le contenu, puisqu’ils se réduisent à expliquer notre vœu de pauvreté et dire que le Pape et le Supérieur général peuvent seuls dispenser de nos vœux. Ainsi, il dira avec vérité : a me probè intellecta.

Je vous envoie avec ces lettres un exemplaire des Constitutions, que M. Odin aura la bonté de vous remettre. C’est un excellent confrère, missionnaire en Amérique. Il nous a beaucoup édifiés et intéressés de toutes manières. Il va voir nos maisons de Picardie, montrez-lui toutes vos beautés, il vous montrera celles des sauvages ; surtout tâchez de lui procurer des secours pour l’Amérique. La nuit dernière, le pauvre M. Logerot6 est tombé de son lit et a été trouvé baigné dans son sang. On l’a saigné et l’on ignore si sa chute n’aura pas de suites fâcheuses. Veuillez m’acquitter auprès de tous vos Messieurs, et me croire en N. S.

votre très affectionné et dévoué cousin.

J.G. Perboyre ind. p. d. l. m.

Paris, le 19 décembre 1833.

  1. Lettre 41. — Maison-Mère, original 32.
  2. Cayla de la Garde (Jean-Félix), C.M., prêtre, né à Rodez le 19 février 1734 ; reçu au séminaire à Cahors le 18 octobre 1749 ; y a fait les vœux le 20 octobre 1751 ; nommé directeur au grand séminaire de Montauban. Elu délégué à l’Assemblée générale de 1788 et élu X° supérieur général par cette assemblée. Décédé à Rome le 12 février 1800. (P. Coste, op. cit., p. 121).
  3. Alméras (René), C.M., prêtre, né à Paris le 5 avril 1613 ; reçu au séminaire à Paris le 25 décembre 1637 ; y a fait les vœux le 25 février 1640 ; décédé à Paris le 2 septembre 1672. iie Supérieur général. (P. Coste, op. cit., p. 16).
  4. Cette phrase pourrait se compléter comme suit : « quand la Congrégation ne nous redemande qu’une si minime partie de ce qu’elle nous a si largement donné, pouvons-nous le lui refuser ? »
  5. Vicart (Narcisse-Eugène), C.M., prêtre, né à Doullens, diocèse d’Amiens, le 8 juin 1806 ; reçu au séminaire à Paris le 25 janvier 1831 ; fit les vœux à Montdidier le 25 avril 1833 ; décédé à Montdidier le 13 avril 1849.
  6. Logerot (Jean-Baptiste), C.M., prêtre, né à Villeroy, diocèse de Langres, le 21 décembre 1762 ; reçu au séminaire à Paris le 14 décembre 1779 ; y a fait les vœux le 18 décembre 1781 ; décédé à Paris le 28 décembre 1833. (P. Coste, op. cit., p. 391).

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