Une Semence d’Eternité : Saint Jean-Gabriel Perboyre : Prêtre de la Mission, Martyr, Premier Saint de Chine (17)

Francisco Javier Fernández ChentoJean-Gabriel PerboyreLeave a Comment

CRÉDITS
Auteur: Jean-Yves Ducourneau, cm · Année de la première publication : 1996.
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16. La moisson inachevée

La piété des fidèles est une chose remarquable. C’est elle qui parfois, sanctifie un homme de ses prières et autres ex-voto. Jean-Gabriel a connu le même chemin. Ses vêtements, les instruments de son supplice, ses lettres sont passés du statut de simple objet à celui de « reliques ». Tout est devenu comme un patrimoine sacré nous rappelant le martyr et son passage parmi les hommes. Aujourd’hui encore, en Chine, on possède la stèle de son tombeau. Elle est confiée maintenant au grand séminaire régional de Wuhan comme une relique afin que les futurs prêtres se souviennent de ceux qui les ont précédés dans la foi.

La procédure de la Béatification s’est poursuivie simultanément en France et en Chine. En 1862, un procès apostolique restreint fut organisé à Rome. Pour le compléter, l’institution d’un nouveau procès apostolique en Chine fut décidée. Après quelques aléas dûs aux troubles survenus en la Ville Éternelle ces années-là, le dossier fut enfin complet et prêt à l’étude en 1879. Entre 1886 et 1888, la Congrégation préparatoire chargée de la cause de Béatification rendit un jugement positif. Le pape Léon XIII le confirmait solennellement le 12 juin 1888.

Le 12 mars 1889, une dernière réunion précisait alors que l’Église pouvait procéder en toute sûreté, à la Béatification tant attendue de Jean-Gabriel Perboyre. Le 30 mai suivant, le Saint-Père promulguait le décret de Béatification et le 10 novembre de la même année, une nombreuse assistance se pressait à Rome, dans la Chapelle Sixtine, pour la Célébration. Parmi elle, on discernait le frère cadet de Jean-Gabriel, le père Jacques Perboyre ainsi que sa sœur Marie-Anne, Fille de la Charité. Une importante délégation du diocèse de Cahors avait fait également le long déplacement. La fête réjouissait tous les cœurs. Le « grand martyr » devint à ce moment-là le Bienheureux Jean-Gabriel. Bien des célébrations d’action de grâce furent organisées en de nombreux pays où la famille Vincentienne était à l’œuvre. Elles se sont attachées à mettre en relief les grandes qualités de ce missionnaire fort apprécié dans son ministère en France et qui a réalisé en Chine, son grand désir de donner sa vie pour le Christ.

Un des anciens séminaristes du Bienheureux martyr n’a pas pu se joindre à cette foule en liesse. Décédé le 7 juillet 1887, il a gardé pendant longtemps dans son cœur un précieux souvenir. Pierre-Marie Aubert, prêtre de la Mission, devenu supérieur de la maison de Sainte-Anne à Amiens, raconte :  » Un jour, étant au séminaire de Saint-Lazare, je servais la messe à Jean-Gabriel, lorsqu’au moment de la consécration, je le vis élevé au-dessus de terre et ravi en extase. Le Saint Sacrifice achevé, le serviteur de Dieu fut alarmé dans son humilité, craignant que je ne révèle ce dont je venais d’être témoin. Aussi, de retour à la sacristie, M. Perboyre me fit promettre là-dessus un secret inviolable tant qu’il serait en vie. Je gardais le silence jusqu’après son martyre ». Aujourd’hui, les fidèles peuvent trouver dans l’Église Sainte-Anne, bâtie par le père Aubert, une chapelle latérale dédiée à Jean-Gabriel et à François-Régis Clet, les deux martyrs de Ou-Tchang-Fou.

Dans les églises du Lot, se sont mises à fleurir de nombreuses statues de Jean-Gabriel. Le rappel de ce que fut sa vie peut ainsi se lire dans le visage serein du Bienheureux représenté en martyr dans sa robe rouge de condamné. Malgré une Église rurale qui semble souffrir de la désaffection de ses membres les plus jeunes, les plus âgés restent accrochés à leur Bienheureux martyr. Chaque année, une grande célébration a lieu en la petite Église de Montgesty qui résonne de la gloire de « son » Jean-Gabriel.

Cette année 1996 voit aboutir de longues procédures en vue de la Canonisation. La Congrégation des Saints chargée du procès a étudié deux guérisons considérées comme miraculeuses et en particulier celle de sœur Gabrielle Isoré, guérie à 38 ans en 1889 d’une névrite polyradiculaire ascendante. En 1994, à Rome, une conclusion médicale précise sans conteste le caractère miraculeux de cette guérison. Le 21 février 1995, les théologiens se réunissent à leur tour et entérinent cette décision. Ils seront suivis, le 4 avril suivant par la Session Ordinaire des Pères Cardinaux et Évêques qui confirment cette conclusion. A son tour, Jean-Paul II déclare : « Il résulte certain qu’il y a eu miracle, accompli par Dieu, à l’intercession du Bienheureux Jean-Gabriel Perboyre, prêtre profès de la Congrégation de la Mission de Saint Vincent de Paul, dans le cas de guérison soudaine, parfaite et durable de Sœur Gabrielle Isoré ».

Le 2 juin 1996, en place de Rome, Le Bienheureux Jean-Gabriel Perboyre devient Saint Jean-Gabriel Perboyre. Sa fête sera célébrée chaque année le 11 septembre, jour anniversaire de son martyre.

Notre nouveau Saint nous invite et même nous pousse à poursuivre la Mission de la Moisson. Le champ est immense et les ouvriers manquent à l’appel. Dieu aidant, il nous pousse à arpenter les champs du monde, en Chine comme en Europe ou dans le reste du globe. Jean-Gabriel n’est pas une statue d’église mais il fut un être vivant, un chrétien, un missionnaire de la famille de Saint Vincent de Paul. Parmi bien d’autres, à sa manière, il a été signe de l’Amour de Dieu qui comble la vie d’un homme acceptant de se mettre au service de ses frères. Il nous fait signe aujourd’hui d’entendre et de crier l’appel du Seigneur : « Allez, de toutes les nations, faîtes des disciples » (Mt 28, 19). Que son exemple nous stimule et nous rappelle que la Parole du Christ a sa place jusqu’aux limites du monde et qu’elle est source de vie sanctifiante parce qu’elle est Semence d’Éternité…

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