La vie du vénérable serviteur de Dieu Vincent de Paul, Livre second, Chapitre Dernier, Section I

Francisco Javier Fernández ChentoVincent de PaulLeave a Comment

CRÉDITS
Auteur: Louis Abelly · Année de la première publication : 1664.
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Chapitre dernier : Les emplois de M. Vincent pour le service du roi dans les conseils de Sa Majesté et ailleurs, pendant le temps de la Régence de la Reine-Mère.

Nous pouvons bien mettre ici, entre les grandes œuvres de M. Vincent, ses emplois dans le conseil du roi pour les affaires ecclésiastiques, et les services qu’il a rendus à Sa Majesté; puisque outre l’importance des affaires qui lui ont été confiées et dont il s’est toujours très dignement acquitté, C’est dans ces occasions qu’il a particulièrement fait paraître quelle était la force de son esprit et l’éminence de sa vertu. En quoi il mérite d’être d’autant plus estimé que c’est chose  plus rare de trouver en un même sujet ce qu’on a vu et admiré en lui dans ses emplois; c’est à savoir, un accès favorable auprès des souverains, et un parfait dégagement de tous les intérêts du siècle; une prudence politique et une simplicité chrétienne; une grande vigilance et activité dans les occupations extérieures, et une récollection intérieure et union intime avec Dieu; le maniement de diverses affaires très importantes, et une droiture de cœur inaltérable; un flux et reflux continuel de toutes sortes de personnes qui l’abordaient, et une constante égalité d’esprit, accompagnée d’une douceur et affabilité toute singulière envers tous; enfin un entendement capable des plus importants emplois pour le service de son prince, et une volonté toute pénétrée des sentiments d’une solide et parfaite dévotion envers Dieu.

C’est ce qui a été reconnu avec étonnement par tous ceux qui ont observé de plus près la conduite de M. Vincent, dont nous rapporterons quelques exemples en ce chapitre: Et quoiqu’il ait été très réservé en ses paroles touchant les choses qui concernaient le service de Sa Majesté, tenant cette maxime, qui a autrefois été enseignée par un ange, que Sacramentum regis abscondere bonum est  on en a eu néanmoins connaissance par d’autres voies qui ont donné moyen de. connaître quelque partie des vertueuses déportement de ce grand serviteur de Dieu dans ces occasions importantes où la Providence l’avait engagé; et comme tout ce qu’il y a fait a été un ouvrage de la grâce divine, nous le pouvons bien déclarer et publier avec honneur, puisque, comme a dit ce même Esprit céleste, opera Dei revelare et confiteri honorificum est

Section I : Premier entrée de Monsieur Vincent dans le Conseil du Roi pour les Afffaires Ecclésiastiques

Après le décès du roi Louis XIII, d’heureuse et triomphante mémoire, arrivé en l’année 1645 la Reine-Mére se voyant chargée de la conduite de cette grande monarchie pendant la minorité du roi son fils; et reconnaissant que, pour attirer la protection de Dieu sur une personne qui lui était si chère et sur tout son Etat, elle devait, avant toute autre chose, mettre un bon ordre dans les affaires qui concernaient la religion, et faire en sorte que Dieu régnât dans le cœur de tous ses sujets, afin que par ce moyen l’autorité royale y fût mieux affermie. Elle établit à cet effet un conseil pour les affaires ecclésiastiques, et particulièrement pour la disposition des bénéfices qui étaient à la nomination de Sa Majesté; et ayant une connaissance particulière de la vertu et des autres excellentes qualités de M. Vincent, elle désira qu’il fût du nombre de ceux qui devaient composer ce Conseil.

Il ne se peut dire combien cet humble serviteur de Dieu fut surpris et étonné, lorsqu’on lui apporta cette nouvelle, ni quels efforts il fit pour persuader la reine de le dispenser de cet emploi, qui lui était d’autant plus insupportable qu’il paraissait plus honorable et plus éclatant devant les yeux des hommes. Mais Sa Majesté persista en sa première résolution, et fit savoir à M. Vincent qu’elle désirait absolument qu’il rendît ce service à Dieu et au Roi son fils; son humilité fit place à l’obéissance, et il crut que cette déclaration de l’intention de la reine lui était une signification de la volonté de Dieu: c’est pourquoi renonçant à tous ses propres sentiments, il s’offrit à Dieu pour faire en cela tout ce qui lui serait le plus agréable; Et quoi que dès lors il prévit fort bien les grandes tempêtes et les violentes secousses auxquelles il allait s’exposer sur cette mer orageuse de la Cour, et que sa propre expérience lui lit assez connaître qu’en soutenant les intérêts de la justice et de la piété, il recevrait beaucoup de contradictions et de persécutions de la part du monde; cependant il crut qu’il ne pouvait mieux faire que de s’abandonner à la divine Providence, dans la résolution de s’acquitter saintement de la charge qui lui était imposée, et de garder une fidélité inviolable à Dieu et au roi, quoi qu’il lui en dût arriver .

Pour éviter néanmoins la perte du temps qui lui était si cher et qu’il employait si dignement, comme aussi pour prévenir plusieurs autres inconvénients, il résolut de n’aller jamais à la cour s’il n’y était appelé ou s’il n’y était obligé par quelque nécessité urgente et indispensable; ce qu’il supplia la reine d’agréer, et ce qu’il a toujours depuis inviolablement observé; Il a bien fait voir toutefois que ce n’était pas par défaut d’affection au service de Sa Majesté qu’il désirait se comporter de la sorte, et que, s’il n’accomplissait pas tous les devoirs d’un courtisan, il savait fort bien s’acquitter de ceux d’un fidèle serviteur, se tenant toujours dans la disposition de rendre une prompte obéissance à Sa Majesté lorsqu’elle lui commanderait de l’aller trouver.

Cette résolution servait beaucoup à M. Vincent; parce que la reine lui faisant l’honneur de prendre ses avis, plusieurs personnes de grande qualité qui venaient réclamer sa faveur et sa recommandation l’eussent obligé par leurs instances d’aller et venir sans cesse pour leurs affaires, s’il ne s’en fut excusé sur cette maxime qu’il avait de n’aller jamais à la cour sinon lorsqu’il y était mandé, comme aussi sur sa profession, à laquelle il n’était pas convenable de se mêler des affaires séculières.

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