La fin et l’esprit de la Compagnie

Francisco Javier Fernández ChentoFilles de la CharitéLeave a Comment

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Author: Desconocido · Year of first publication: 1972 · Source: Vincentiana, 1972.
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Introduction

Plusieurs provinces en situation difficile et d’autres qui elles, sont sur la voie d’un renouveau, estiment nécessaire que nous ré­fléchissions, en vue de la prochaine Assemblée générale, á l’orien­tation de la Compagnie.

On peut penser en effet que l’unité de la Communauté dépend davantage d’une orientation spirituelle commune que d’une bonne administration.

Pourquoi cette requête ?

1° Il y a chez beaucoup un grand désir de connaitre St. Vincent et d’être fidèles á son inspiration. Mais on le connait peu ou pas du tout, parée que ses écrits n’ont pas été traduits ou que les études publiées á son sujet ne sont pas accessibles dans la langue du pays. Une autre difficulté vient de ce que son expérience spiri­tuelle et apostolique est liée á un autre siècle, á un autre contexte culturel.

2° Le monde dans lequel nous vivons a changé rapidement, et la remise en cause de notre existence comme communauté et de notre action est précisément plus aigüe dans les pays ou provinces où ce changement a été plus rapide et plus profond.

Beaucoup de nos œuvres traditionnelles: missions populaires, séminaires, etc. ont disparu, ou sont en voie de transformation profonde.

Le service des pauvres est lui-même pris en charge par la société. Les confrères rendus disponibles par ces changements ont souvent été employés dans les ministères ordinaires du clergé diocésain afin de ne pas se sentir inutiles et de retrouver une raison d’être: paroisses, aumôneries diverses, Action catholique, etc…

Mais certains se demandent alors : « Pourquoi sont-ils prêtres de la Mission ? »

De mémé des jeunes susceptibles d’entrer chez nous se de­mandent pourquoi se feraient-ils lazaristes, puisqu’il suffit d’être prêtre diocésain pour faire ce que nous faisons, si toutefois il s’agit seulement de faire quelque chose.

3° Cependant plusieurs provinces constatent que de nou­velles formes de pauvreté existent: immigrés, victimes de la dro­gue, inadaptés sociaux, et autres marginaux. Mais nous ne pouvons-nous en occuper, car nous sommes embarrassés de paroisses et d’institutions, dont le fonctionnement nous absorbe complétement.

4° Certaines provinces et certains confrères ont trouvé dans la formulation de la fin de la Compagnie au chapitre premier des Constitutions nouvelles, le principe d’un renouveau. Pour d’autres par contre, ces textes ne sont pas assez clairs et ne leur paraissent pas engager suffisamment la vie de la Compagnie et celle de chacun de ses membres.

Aussi le groupe des Six propose á la réflexion de tout cet aperçu synthétique mettant en relief l’unité de notre vie et l’actualité de notre vocation.

Etablissons pour cela un parallèle entre

1° Notre vocation á la Mission

2° Les appels récents de l’Eglise

3° Les aspirations actuelles du monde.

Notre vocation

Suivre le Christ portant la Bonne nouvelle aux pauvres, telle a été la démarche évangélique qui a illuminé St. Vincent dans sa vie spirituelle et son action apostolique.

C’est par cette démarche fondamentale que le Christ a commencé sa mission. Pour sauver tous les hommes il estime nécessaire de s’adresser en priorité aux pauvres, et pour être entendu et compris par eux, il se fait l’un d’eux. Toute sa vie est conforme á ce choix, et son enseignement est dans la même ligne:

Le premier article de la charte du Royaume est: «Beati pau­peres spiritu».

C’est par cette même démarche que St. Vincent est entré dans sa vocation: pour suivre le Christ, chercher la perfection, vivre comme lui, faire ce qu’il a fait, St. Vincent commence par servir les pauvres, puis par un enchainement naturel, son action s’étend au clergé, puis á d’autres urgences.

C’est pour continuer cette mission du Christ qu’il crée la Com­pagnie: elle a á suivre la ligne tracée par son fondateur, mais elle doit faire preuve á son tour d’esprit créateur pour adapter sa vie et son action aux exigentes et aux urgences actuelles (Constitut. n. 18).

La démarche qui inaugure et oriente la mission du Christ, qui inaugure et oriente la mission de St. Vincent: la Bonne nou­velle portée aux pauvres est pour nous.

«Le signe (l’emblème) qui nous rassemble et nous porte á l’action apostolique comme nous le rappelle le n. 5 de nos Con­stitutions.

Quel que soit le domaine dans lequel la Communauté nous a demandé de travailler, même si nous sommes employés á des urgences qui nous semblent fort éloignées du service des pauvres, nous sommes marqués par l’orientation générale de la Compagnie, nous ne pouvons pas et nous ne devons pas nous en désolidariser.

Les appels de l’Eglise

L’Eglise a été marquée au cours des siècles derniers et jusqu’á Vatican II par la société ambiante, qui était et qui est encore très hiérarchique dans sa structure en classes sociales, très soucieuse d’organisation, d’efficacité, de rentabilité.

L’Eglise a pu paraitre garante morale de cet ordre social, mais le monde des petits qui lui, en était victime l’a assez reproché et le reproche encore á l’Eglise.

Aussi sans négliger sa mission á l’égard de tous, l’Eglise a estimé, spécialement depuis Vatican II ne pouvoir l’assumer qu’en mar­quant un retour très net á la volonté première du Christ, á ce qu’il a fait et á ce qu’il a enseigné.

Elle voudrait être parmi les hommes la présence du Christ pauvre. Lumen Gentium n. 41.

Elle veut s’adresser en priorité aux plus délaissés. Gaudium et Spes n. 51 et 88. On pourrait multiplier les citations con­ciliaires.

Plusieurs des dernières grandes encycliques: Mater et Magistra et Populorum progressio insistent sur le souci des pauvres.

Les actes de Medellin et plus récemment la lettre au cardinal Roy soulignent de maniéré très précise la sollicitude de l’Eglise pour les pauvres.

De nombreuses prises de position épiscopales en font autant, ce qui a le don d’indisposer les possédants.

Les aspirations du monde

Le monde est engagé dans le développement d’une civilisation de « l’avoir >> qui progresse de manière accélérée et s’étend de proche en proche á toute la terre.

Elle crée, d’une part la frustration de ceux qui ne peuvent suivre et aux dépens de qui se fait ce progrès matériel: d’immenses zones de misère appellent un effort de développement et de promotion, pour apporter aux pauvres une espérance.

Elle provoque, d’autre part la saturation jusqu’au dégoût, de ceux qui possèdent et qui s’interrogent sur le sens de cette course frénétique vers la possession et la jouissance.

Ils appellent tous une libération et une espérance:

Pour les uns libération de la misère et de toutes ses servitudes,

Pour l’autre libération de cet enchainement de progrès ma­tériel sans trêve ni répit et de ses conséquences que l’on commence á découvrir.

A travers toutes les formes de contestation de la société par ceux qu’elle a comblés, apparait une certaine soif de pauvreté et de simplicité.

C’est aux uns et aux autres, sans même qu’ils s’en doutent que s’adresse la première béatitude « Bienheureux les pauvres en esprit, car le Royaume des cieux est á eux».

En conclusion

Compte tenu des appels récents de l’Eglise et des aspirations actuelles du monde, notre option fondamentale á la suite de St. Vincent, nous apparait plus claire et plus actuelle que jamais.

Le chemin de la Mission tel qu’il y a trois siècles nous l’a tracé St. Vincent, est á nouveau tracé, marqué et balisé par les « signes des temps

L’orientation générale de notre Compagnie, nettement af­firmée commande.

Notre vie spirituelle

Si nous voulons suivre Jésus Christ portant la Bonne nouvelle aux pauvres il faut commencer par entrer dans ses sentiments: Philipp. 2. 5-8, l’imiter dans les vertus et dans les comportements qu’il a adoptés dans ce but.

Ce sera pour nous chercher la perfection par la pratique des 5 vertus fondamentales et des maximes évangéliques, en commençant par l’humilité.

Cette poursuite toute spirituelle du but de la Compagnie, cette imitation du Christ, est réalisée de manière éminente par nos confrères malades et vieillards infirmes.

Elle commande notre action apostolique

Celle-ci est orientée prioritairement vers les pauvres, mais dans toutes les autres urgences auxquelles nous sommes appliqués: aide au clergé, séminaires, prédications, retraites, ministère auprès des classes aisées, et même enseignement profane, nous nous sou­viendrons de cette orientation première.

Dans notre action apostolique, elle commande le type de moyens que nous emploierons: il ne faudrait pas que la richesse des moyens dénature la poursuite de la fin générale de la Compagnie. Il ne faudrait pas que l’accumulation des moyens matériels et des struc­tures paralysent notre liberté de recherche et de création au ser­vice des pauvres.

Elle commande le type d’études que nous pousserons plus vo­lontiers afin que la Compagnie soit au service des pauvres, même au plus haut niveau d’efficacité:

Etudes sociales et économiques, problèmes de développement et de civilisation.

Par quels enchainements les pauvres ont-ils abouti là où ils en sont ?

Quel sens et quelle .me faudra-t-il donner á cette société d’abondance ?

Elle commande notre vie communautaire

Notre vie communautaire doit commencer par cette humilité qui consiste á avoir besoin des autres et á le reconnaitre simplement.

Nous avons besoin d’une aide fraternelle pour mener ensemble une telle vie spirituelle, c’est ensemble que nous y progresserons et que nous l’approfondirons et pour mener ensemble un tel aposto­lat il ne doit pas y en avoir chez nous qui exercent comme on dit des ministères valables et d’autres qui font ce que la communauté leur a demandé, car c’est la communauté entière qui prend une orientation, et pour qu’elle puisse la tenir, des rôles divers doivent être remplis.

Enfin c’est en tant que communauté que nous serons un signe dans l’Eglise, pour les fidèles et pour les prêtres (Matth. 11. 3-6) et que nous serons aussi un signe dans ce monde qui pourra recon­naitre en nous les fils, de celui qu’autrefois on a appelé « le Père des pauvres

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