En 1640, à Angers , est signé l’acte d’introduction des Filles de la Charité à l’hôpital Saint-Jean. Saint Vincent tenait beaucoup à cet établissement. Il y avait été amené par la présidente Goussault, très émue elle-même de l’abandon dans lequel infirmières et aumôniers laissaient les malades de cet antique hôpital. L’intérêt de saint Vincent pour cette fondation est perceptible dans le fait qu’il permit à Mlle Le Gras, malgré son état de santé et malgré l’hiver, de se rendre elle-même à Angers. De plus, saint Vincent, en dépit de tous les besoins du moment, donna, d’un seul coup, neuf de ses Filles ; enfin pour elles, il rédigea, lui-même, un règlement journalier qui est le modèle du genre, et en 1649, il se rendra lui-même à Angers. L’acte d’établissement porte la signature du lieutenant général d’Anjou, de Mlle Le Gras et de huit Filles de la Charité. Angers a ainsi l’honneur de posséder le tout premier des hôpitaux fondés par saint Vincent et sainte Louise1.
En 1794 , à Angers , par une émouvante coïncidence, c’est le 1 er février que deux Sœurs de l’hôpital sont tuées en haine de la foi. Sur leur refus de prêter le serment exigé par le gouvernement révolutionnaire, Sœur Odile Baumgarten et Sœur Marie-Anne Vaillot furent emprisonnées le 19 janvier. Il y avait dans la ville deux communautés dont toutes les Sœurs avaient prêté le serment ; les révolution-naires pensèrent que si elles y étaient enfermées, nos deux Sœurs seraient contaminées par cette atmosphère de faiblesse. Mais Odile et Marie-Anne tinrent bon. Alors, le 1er février, liées l’une à l’autre par une même corde, elles prirent place dans cette longue chaîne de quatre cents condamnés qui furent conduits au lieu appelé depuis «Champ des Martyrs».
Quand on y fut arrivé, la fusillade commença. Sœur Odile fut tuée tout de suite. Sœur Marie-Anne, blessée au bras, soutenait encore sa compagne ; elle eut le temps de dire : «Pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font.» La fusillade finie, les exécuteurs se jetèrent sur les victimes et, à coups de sabre, les hachèrent en morceaux. C’est ainsi qu’exactement cent cinquante-quatre ans après la signature de l’acte de fondation de l’hôpital d’Angers, Marie-Anne de Fontainebleau et Odile de Lorraine ajoutèrent à cet acte officiel la plus riche signature : celle du sang. Le 24 février 1905, l’évêque d’Angers a ouvert le procès de l’Ordinaire en vue de la béatification de ces deux Filles de saint Vincent et de leurs compagnons de supplice. Cette décision épiscopale a été prise en raison des grâces et des faveurs extraordinaires qui ont été obtenues sur les lieux de leur mort2. Sœur Odile Baumgarten et Sœur Marie-Anne Vaillot furent béatifiées par le Pape Jean-Paul II le 19 février 1984.