Message de Carême 2013 (G. Gregory Gay, CM, Supérieur général)

Francisco Javier Fernández ChentoFormation VincentienneLeave a Comment

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Author: G. Gregory Gay, C.M. · Year of first publication: 2013 · Source: Curia Generalizia.
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CONGREGAZIONE DELLA MISSIONE CURIA GENERALIZIA

2013 : Notre chemin de Carême du Calvaire à la Caritas

LE VOYAGE  DE  NOTRE  DAME
Notre Dame, toi tu as porté l’enfant jusqu’à Bethléhem,
Non pas sur une voie rapide, mais sur une route de roches, de cailloux et de pierres mêlés.
Porte-moi toujours sur ton coeur, aimant, tendre et doux Jusqu’à ce que ton Fils me relève dans ses bras crucifiés.
Frère Augustine Towey, CM †2012

A tous les membres de la Famille vincentienne

Chers Frères et Sœurs,

our_ladyQue la grâce et la paix de Notre Seigneur Jésus-Christ emplissent vos cœurs maintenant et toujours !

Cette année, notre chemin de Carême commence tôt. Et pourtant, il n’est jamais trop tôt pour que la Famille vincentienne contemple les dons de la foi en Jésus-Christ ainsi que l’héritage d’espérance que constitue notre charisme. Cette année, le Carême a lieu en « l’année de la foi » que notre Saint Père, le Pape Benoît XVI, dans sa Lettre apostolique Porta Fidei, compare à une « porte de la foi, qui introduit à la vie de communion avec Dieu et permet l’entrée dans son Église […] toujours ouverte pour nous. » (PF, 2012, 1)

Cette année particulière coïncide avec le cinquantième anniversaire du début du Concile Vatican II. Avec le Carême, elle nous offre l’opportunité de réfléchir à notre être de disciples à la suite de Jésus-Christ ainsi qu’à la manière dont nous vivons notre charisme vincentien. Le Carême n’est pas censé être un « exercice annuel » mais une opportunité d’ouvrir notre cœur pour grandir en grâce. Le Pape Benoît nous rappelle que : « Traverser cette porte implique de s’engager sur ce chemin qui dure toute la vie ». (PF, 1)

Le Message de Carême du Saint Père cette année contient un thème vraiment vincentien. Il nous dit que le Carême et l’année de la foi : « nous offrent une occasion précieuse pour méditer sur le rapport entre foi et charité » (MC, 2013, 1). Dans Porta Fidei comme dans le Message de Carême, nous voyons plusieurs références à la citation biblique que nous connaissons bien :

« Caritas Christi urget nos » – « la charité du Christ nous presse » (2 Co 5, 14). C’est l’essence même de ce que signifie être chrétien. Avec les Filles de la Charité, je suis heureux que le Saint Père ait utilisé leur devise !

Pourtant, tous les membres de la Famille vincentienne savent qu’il s’agit bien plus qu’un texte, qu’une devise ou qu’un sceau communautaire. C’est un style de vie pour tous les disciples de Jésus et de saint Vincent et sainte Louise. Il puise son origine en Jésus-Christ qui a dit à ses disciples : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 40). Dans cette lettre, je réfléchirai à trois thèmes opportuns pour notre chemin de Carême : reconnaître, reconfigurer et renouveler.

Un temps pour reconnaître

« Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres » (Jn 8, 32)

Le Carême est un temps de rencontre avec la vérité qui nous permet d’affirmer cette réalité essentielle qui échappe souvent aux chrétiens : nous sommes tous des pécheurs rachetés. Avec le rythme rapide du monde d’aujourd’hui, nous pouvons facilement éviter tout examen personnel en profondeur. Les multiples exigences de la vie arrivent souvent avec une telle férocité qui nous laisse à bout de souffle, que nous cherchons un répit qui peut conduire au détachement. Nous connaissons le dicton de Socrate : « une vie sans examen ne vaut pas la peine d’être vécue ». Mais une vie « non rachetée » non plus !

La « vie rachetée » commence en utilisant la discipline du Carême : la prière, le jeûne et l’aumône pour sonder notre cœur, notre esprit et nos actes. Nous pouvons ensuite, courageusement, nous poser la question cruciale : Qu’est-ce que je fais chaque jour pour grandir dans mon amour pour le Christ et dans le service de mes frères et sœurs, surtout « les plus petits d’entre eux » ? Mais d’abord, nous devons être disposés à modifier l’organisation de nos journées bien remplies pour rencontrer le Seigneur Jésus au plus profond de notre être comme un moment de vérité pour nous. Comme le dit un vieux proverbe : « La vérité vous rendra libre, mais d’abord elle peut vous rendre malheureux ! »

Ces parts de nous-mêmes qui ont besoin de guérison et de rédemption sont finalement du ressort de Dieu. Dans un monde qui nous encourage souvent à nous cacher derrière la façade du pouvoir, de la situation ou de l’apparence, le Carême nous rappelle que ce ne sont pas nos efforts seuls qui apportent l’unité de vie ou la paix intérieure. C’est la dure réalité de la vie que Vincent de Paul a apprise très tôt : en dépit des « avancées et des ascensions » de la vie qu’il a recherchées et qu’il a atteintes, il subsistait en lui un vide intérieur et le désir de quelque chose de plus. Saint Paul illustre bien ce moment de reconnaissance intérieure dans sa lettre aux Ephésiens :

« Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu ; il ne vient pas des œuvres… Nous sommes en effet son ouvrage, créés dans le Christ Jésus en vue des bonnes œuvres que Dieu a préparées… pour que nous les pratiquions » (Ep 2, 8-10).

Faisons de ce Carême un temps pour reconnaître que nous sommes l’ouvrage de Dieu, de qui nous avons reçu les dons et la grâce.

Un temps pour reconfigurer

« Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? » (Jn 6, 28)

Le mot « reconfigurer » peut paraître inhabituel ou peu connu. Autrefois utilisé comme un terme scientifique ou technique, il signifie « changer de forme ou de formation, refaçonner ou restructurer ». Il est connu de mes confrères Lazaristes et des Filles de la Charité, car les changements dans les effectifs et l’apostolat ont rendu nécessaire la reconfiguration de pays et de Provinces.

Mais le Carême n’est pas d’abord concerné par les questions extérieures des « œuvres de Dieu » posées par les disciples à Jésus ni, d’ailleurs, par les exigences du monde actuel. La reconfiguration est aussi une manière de rechercher la « metanoia », ou la conversion du cœur, qui conduit à une ouverture essentielle à Dieu. Le Pape Benoît nous dit que la finalité de cette « année de la foi » est une «  invitation  à une  conversion  authentique et  renouvelée  au Seigneur, unique  Sauveur  du monde » (PF, 6).

Quand nous nous rendons compte que ce à quoi nous tenons le plus, que ce soit nos familles, nos relations, notre travail, notre santé ou notre vie en général, se transforme de manière inattendue ou non désirée, nous rencontrons la réalité de la reconfiguration. Comme le Carême, elle nous appelle à faire un cheminement intérieur à la recherche de Jésus. Nous raccrocher à ce que nous ne pouvons maîtriser, nous cramponner à ce que nous ne pouvons pas changer ou souhaiter que le passé soit le présent, nous détournerait de l’accomplissement de la volonté de Dieu et de l’œuvre de Dieu.

Vincent de Paul et Louise de Marillac ont été tous deux confrontés à la réalité de la reconfiguration dans leur vie. Louise, une femme mariée et aisée, est devenue veuve et elle a été jetée dans un monde inconnu. Après avoir fondé des communautés religieuses et laïques, Vincent était aux prises avec des demandes continuelles qui réclamaient son attention. Parfois, tous deux trouvaient la tâche de la gouvernance écrasante. Pourtant, chacun d’eux avait une vie intérieure nourrie par la prière, la Parole et l’Eucharistie, qui leur donnait la force d’âme pour s’adapter et grandir. Vincent et

Louise cherchaient chaque jour le Seigneur et parvenaient à le trouver. En ce Carême, laissons le Christ reconfigurer notre cœur, afin que nous acceptions les inévitables changements dans le paysage de nos vies.

Un temps pour renouveler

« L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé » (Jn 6, 29)

Le Carême et « l’année de la foi » appellent à un renouvellement et à un approfondissement de notre foi et de notre charisme. Dans un monde tourmenté par bien des souffrances, où le chemin du calvaire est jonché d’innombrables croix, il nous est rappelé que dans le mystère pascal, Dieu est toujours à l’œuvre dans notre monde. Nous rencontrons notre Dieu dans la personne de Jésus qui, par son Incarnation, est entré dans l’humanité et l’a rachetée. Ce renouvellement se produit par la  transformation que  Jésus-Christ  opère en  nous  dans la  prière, la  Parole  de Dieu  et l’Eucharistie, pour nous permettre de mieux vivre notre charisme vincentien. Nous cheminons vers le Calvaire et nous en repartons avec le don de la Caritas.

Le Pape Benoît médite sur cette réalité, en faisant remarquer : « L’existence chrétienne consiste en une ascension continue du mont de la rencontre avec Dieu pour ensuite redescendre, en portant l’amour et la force qui en dérivent, de manière à servir nos frères et sœurs avec le même amour que Dieu » (MC, 3). Dans Porta Fidei comme dans le Message de Carême, le Saint Père s’emploie à souligner le lien intrinsèque entre la foi et le service des pauvres. Il écrit : « La foi sans la charité ne porte pas de fruit… de nombreux chrétiens consacrent leur vie avec amour à celui qui est seul, marginal ou exclu… parce que justement en lui se reflète le visage même du Christ » (PF, 14).

En tant que membres de la Famille vincentienne, nous épousons cette vérité dans notre charisme de la charité. Mais comme toute action vertueuse, elle peut devenir machinale, réduite à une fonction, au lieu de nous faire avancer. Pour nous, disciples de Jésus et de Vincent, la simplicité et l’humilité sont deux vertus essentielles ; ce sont les fondements d’une relation avec Dieu et du service des pauvres. Vincent disait : « Notre-Seigneur ne se met et ne se plaît que dans l’humilité de cœur et la simplicité des paroles et des actions » (Coste XII, 2 Mai 1659, pp. 222-223). Réfléchissons à la manière dont nous pouvons progresser dans ces vertus.

J’ai mentionné la reconfiguration comme une stratégie de la Congrégation. Lors de l’Assemblée générale de 2010, deux stratégies sont apparues sur ce thème qui, je le crois, peuvent s’appliquer à toute la Famille vincentienne. La première : cultiver un sens vital et concret d’appartenance, qui va au-delà du sens d’appartenance à la communauté locale. La deuxième : inciter à la disponibilité personnelle et à la mobilité pour participer à des projets missionnaires nouveaux. En ce Carême, réfléchissons à la manière dont nous pouvons renforcer notre appartenance et notre disponibilité pour vivre notre charisme.

Le chemin de Marie et le nôtre

Cette lettre de Carême s’est ouverte avec un thème marial vécu au milieu d’une scène de désolation et exprimé dans un poème simple et bref. En Novembre 2012, l’ouragan Sandy a provoqué des ravages des Caraïbes à la côte Est des Etats-Unis, occasionnant de terribles destructions. A Breezy Point, une petite plage enclavée dans la ville de New York, la force de l’ouragan a fait exploser les réservoirs d’essence et tomber les lignes électriques, créant un incendie qui a brûlé plus de 100 maisons en quelques minutes. Par miracle, personne n’est décédé. La seule installation restée intacte dans cette zone est un petit sanctuaire consacré à Notre Dame. Aujourd’hui, c’est un lieu de prière pour les résidents de toutes confessions. On l’a appelé la Madone de Breezy Point qui nous montre la puissance protectrice de Marie.

Le poème qui accompagne la photographie a été écrit par un confrère de la région de New York qui est décédé récemment. Ce poème est effectivement l’un de ses derniers. C’est un rappel pertinent non seulement de sa vie, mais de la vie que Marie, notre Dame de la Médaille Miraculeuse, nous a donnée comme Mère du Seigneur. Marie est aussi notre Mère et elle est toujours proche de nous. Que le Seigneur vous bénisse en ce temps de Carême, afin que votre chemin puisse vous conduire à un vrai renouvellement dans la foi, la charité et notre charisme. Que nous puissions toujours servir au nom de Jésus-Christ et à la manière de saint Vincent de Paul.

Votre frère en saint Vincent,

G. Gregory Gay, CM Supérieur général

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