Jean-Gabriel Perboyre, Lettre 064. A son Oncle, à Montauban

Francisco Javier Fernández ChentoÉcrits de Jean-Gabriel PerboyreLeave a Comment

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Author: Jean-Gabriel Perboyre .
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Macao le 13 septembre 1835.

Mon très cher oncle,

La grâce de N.S. soit toujours avec nous.

Si, comme je l’espère, vous avez reçu la lettre que je vous ai écrite de Surabaya vers la fin de juillet, elle vous aura déli­vré de toute inquiétude relativement à ma traversée, qui avait été jusqu’alors fort heureuse. Il ne vous restera donc plus qu’à apprendre des nouvelles de la continuation de notre voyage et de notre arrivée à Macao. Elles ne sauraient être plus satisfai­santes. Partis de Surabaya le 7 août, nous nous sommes paisi­blement acheminés vers la Chine où nous sommes enfin parvenus le 29 du même mois, pleins de joie et de santé. Nous avons aussi trouvé bien portants tous nos confrères de ces pays lointains. Notre maison de Macao, où nous allons passer quelque temps pour étudier la langue chinoise, nous repré­sente en petit notre maison de Paris, c.-à-d. qu’on y voit le même esprit et la même régularité. M. Torrette, qui a été procureur au séminaire de Cahors, en est supérieur et M. Danicourt, qui a été professeur au collège de Montdidier, y est directeur. Ces deux excellents confrères sont secondés par deux de ces Chinois que vous avez vus à Paris et qui sont aujourd’hui prêtres, MM. Ly

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et Tchiéou2. Ils ont à instruire douze à quinze Chinois sur le latin, que la plupart entendent et parlent très bien, sur la philosophie et la théologie, ils les forment par divers exercices et toutes sortes de soins à devenir de bons missionnaires et de dignes enfants de saint Vincent. Par la grâce de Dieu, on y réussit parfaitement.

Nous avons à Macao des confrères portugais qui dirigent le séminaire diocésain ; il y en a encore dans plusieurs provinces de l’intérieur. M. Torrette est visiteur pour tous les Lazaristes de Chine.

Je connaissais déjà tous les confrères français qui m’avaient précédé. Je ne les reverrai pas tous : ils sont la plupart éparpillés dans diverses provinces plus grandes que la France entière. Quels que soient ceux avec qui je serai destiné à travailler, je m’en féliciterai ; je ne me lasserai point de bénir le Seigneur de la grâce qu’il m’a faite d’aller annoncer son saint nom parmi les infidèles et j’espère que je l’en bénirai éternellement avec vous.

Par la même occasion, j’écris un mot à mes frères. Je désire que tous mes parents pensent par-dessus tout à leur grande affaire et qu’ils ne fassent attention à mon éloignement que pour demander à Dieu ma sanctification et celle des personnes au salut desquelles je serai appelé à travailler.

Veuillez le prier aussi, mon très cher oncle, de m’accorder cette grâce et cette bénédiction : ma vie a été jusqu’ici si vide, quoique j’aie déjà parcouru la moitié d’une longue carrière ! Ce pèlerinage passe bien vite : hélas ! combien j’en sais peu user.

L’Assemblée générale doit avoir déjà eu lieu. J’ai grande confiance que Dieu l’aura bénie ; il a donné tant de preuves qu’il chérissait encore la chétive famille de saint Vincent. Quoique l’ait toujours déshonoré cette famille, je lui suis attaché par le fond de mes entrailles et je donnerais mille vies pour elle.

Vous savez que je lui dois ainsi qu’à vous plus que je ne puis dire. Je compte devoir encore à la communion de ses prières et des vôtres de traverser sans naufrage la mer de ce monde et de parvenir au port où nous attend notre Bienheureux Père.

Ce matin, j’ai prêté le serment que prescrivent les Bulles Ex illâ die, et Ex quo, qui condamnent les rites chinois.

Veuillez, mon très cher oncle, interpréter mes sentiments auprès des personnes que vous savez me […]3.

Lettre 64. — Maison-Mère, original 51.

  1. Ly (Joseph), C.M., prêtre, né à Mien-yang, Hou-pé, le 23 mars 1803 ; reçu au séminaire à Macao le 28 avril 1827 ; fut envoyé en France en 1828 ; fit les vœux à Paris le 17 juillet 1829 ; revint en Chine en 1831 ; fut ordonné prêtre à Manille le 8 avril 1832. Missionnaire au Kiangsi en 1835, au Tché-kiang en 1841, au Koang-tong en 1845, revint au Kiang-si en 1850. Décédé le 9 juin 1854.
  2. Tchieou = K’ieou (François), C.M., prêtre, né à Ta-li près de Canton en 1808 ; reçu au séminaire à Macao en 1828, envoyé en France pour y faire son séminaire ; revint en Chine en 1831 ; fit les vœux à Macao le 20 mai 1832 ; ordonné prêtre à Manille le 1er décembre 1833. Missionnaire au Tché-kiang en 1842, au Kiang-si en 1852. Décédé à Kiou-tou près de Kien-tch’ang fou le 19 juin 1874.
  3. La conclusion de cette lettre a été coupée ainsi que la signature et donnée à une malade. (Note de M. Jacques Perboyre).

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